Collectif sous les directions de Pascal Querel & Georges-Pierre Wchmant - Le site antique d'Estrées-Saint-Denis (Oise)

PRODUCTION ET CONSOMMATION

PREMIERS ELEMENTS DE SYNTHESE

Pascal QUEREL

Les mobiliers de l'habitat

Du point de vue quantitatif, la fouille de la zone d'habitat s'apparente aux fouilles urbaines. En effet, plus de 285 kg de céramiques et environ 75 kg de restes osseux animaux ont été collectés et traités. L'inventaire général réunit également plusieurs centaines d'objets différents (numéraire, pièces de tabletterie, objets en bronze et en fer, verrerie, argiles cuites...) et quelques déchets artisanaux. Leur étude fut nécessaire pour établir la chronologie des structures fouillées et appréhender leurs fonctions, ainsi que celle du site.

L'étude des mobiliers nous renseigne sur les différents aspects de la vie du site et, notamment, son économie, en terme de consommation et de production. Dans le cas présent, aucune activité de production « intensive » n'est attestée. Les pratiques identifiées semblent plutôt s'inscrire dans un cadre « domestique ».

Premiers éléments de synthèse

Les activités de tissage et de filage sont révélées par la découverte de soixante-trois fragments de pesons (dix-sept exemplaires) et de quatre fusaïoles ; les pesons sont de type pyramidal ou prismatique. D'un point de vue chronologique, cette série n'apporte que peu de renseignements. En effet, seuls les modèles à quatre pans sont susceptibles d'être plus tardifs ou plus strictement attribuables à la période gallo-romaine ; ceux à arêtes arrondies étant a priori plus précoce (Ferdière, 1984). Les modèles prismatiques, dont le principe d'utilisation demeure incertain (Ferdière, 1984, p. 219, fig. 4), couvrent une période encore plus large. Dans le cas du site d'Estrées-Saint-Denis, les contextes de découverte s'étendent de La Tène Dl au milieu du Ier siècle après J.-C. et couvrent, peut-être aussi, la période flavienne. Ces données corroborent les résultats de l'étude archézoologique selon laquelle la représentation des caprines diminue fortement au IIe siècle. À l'exclusion de cinq exemplaires en position de rejet secondaire, les pesons proviennent de dépotoirs domestiques (fossés 1 352, 1 045, fosse 1 832, colmatage superficiel du puits 1 303) et de la fosse-foyer 1 487, datée de La Tène D2. Cette dernière a livré vingt-quatre fragments plus ou moins bien cuits correspondant à un minimum de

six exemplaires et peu de mobilier associé. L'interprétation d'une fosse-foyer liée à la fabrication de pesons est envisagée et permet d'inscrire cette « production » dans un cadre domestique.

La découverte d'une vingtaine de fragments de meules soutient l'affirmation selon laquelle la meunerie était pratiquée sur ce secteur de l'agglomération d'Estrées. Ces objets proviennent de contextes attribuables à toutes les périodes de l'occupation du site, mais ils sont, pour la plupart, réemployés comme calages de poteau ou insérés dans des fondations (les solins du bâtiment tardif 1 904 ont livré trois meules : une en poudingue, deux en grès), ou en situation de rejet secondaire. Il paraît donc inutile de parler en terme de répartition spatiale et il est préférable de se limiter à une approche simplifiée de la répartition chronologique de ces vestiges (présence-absence).

Les plus anciens, découverts dans des dépotoirs primaires, datent de La Tène Dl (fossé 1 352). Le remblai du puits 1 303 a livré deux fragments rubéfiés de meules en poudingue (La Tène D2). Un dernier dépotoir, celui de la fosse-fossé 1 013 du début du IIe siècle, comprenait un unique fragment rubéfié de meule en grès. Ce type d'instrument n'est pas, ici, antérieur à la période augustéenne (puits 1 684). Parallèlement, les données de la carpologie indiquent l'adoption du blé tendre, signe de romanisation, dès le début de notre ère.

L'analyse archéolozoologique révèle, quant à elle, pour les phases tardives une exploitation spécifique des os de bovidés en vue, par exemple, de la production d'huile de pieds de bœuf.

Étonnamment, la métallurgie du bronze n'est pas attestée, mais nous connaissons les limites qui régissent tant la découverte que l'interprétation des vestiges de cette activité (Querel, 1999).

Le travail du fer est, quant à lui, présent durant toutes les phases de l'occupation. Nous ne disposons toutefois que de témoignages indirects, caractéristiques du travail de la forge (Serneels, 1998), soit

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